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Saison au Congo (une)
Ces fiches sont soumises au respect de la propriété intellectuelle.
Fiche réalisée par Dany Toubiana
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Martinique
1966
Paru en 1966 aux Editions du Seuil, édité dans la collection Points-Seuil en 1973
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Genre
Drame historique
Nombre de personnages
5 femmes
25 hommes
Longueur
3 actes
117 pages
Temps et lieux
Au Congo dans les années 60
Thèmes
chute de Patrice Lumumba , ascension politique
Mots-clés
Congo , Lumumba , pouvoir politique
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Consultation de la fiche par rubriques |
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Un premier repérage :
la fable
Résumé de la pièce
Parcours dramaturgiques
Analyse dramaturgique qui fait apparaître l'originalité
de la structure et son fonctionnement général par
rapport à l'espace, au temps, aux personnages, etc.
Pistes de lecture
Analyse plus philosophique et poétique, voire linguistique
qui permet de dégager une interprétation et les
véritables enjeux de la pièce
De plain-pied dans le texte
Un extrait
Du texte à la scène
Petite histoire de la pièce de ses conditions d'écriture
à sa création en passant par les lectures dont elle
a pu faire l'objet
Pour poursuivre le voyage
Extraits de presse ou d'entretien au sujet de la pièce
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Un premier repérage : La fable
Nous sommes au Congo Belge en 1958 lorsque la pièce débute, c'est une pleine période d'effervescence qui va mener le pays à l'indépendance. Une fois celle-ci acquise se font jour les oppositions et les diverses pressions pour l'acquisition d'une parcelle du pouvoir. Les colonisateurs, qui semblent avoir quitté la scène politique, attisent les dissensions et tentent encore de conserver le pouvoir économique au besoin en encourageant la sécession du Katanga, une des provinces congolaises. Patrice Lumumba, nommé Premier Ministre dénonce ces malversations. L'atmosphère de liberté et de luttes politiques fiévreuses pour la conquête de l'indépendance, puis l'ascension de Patrice Lumumba sont le sujet de la pièce de Césaire. Un héros au temps compté, un chemin semé d'embûches, une mort violente et prématurée, tout est là pour créer à la fois le mythe politique et théâtral. à partir de ces faits politiques précis et à peine transformés, Césaire transfigure la réalité pour faire de Lumumba une figure charismatique à la lucidité exaltée, symbole de toute l'histoire d'un continent.
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Parcours dramaturgiques
Chaque pièce d'Aimé Césaire contient un ferment d'un ordre nouveau et révolutionnaire. Souvent, le charisme et le sens prophétique de ces héros -même historiquement reconnaissables - en sont les supports. Une des caractéristiques subversives du héros césairien serait d'être un révolutionnaire prophétique. La première scène de l'acte I de Une saison au Congo est totalement liée à l'expression de la culture africaine. Que voit-on ? Sur la place d'un quartier africain de Léopoldville, un bonimenteur vend de la bière, on apprend très vite que ce bonimenteur n'est autre que Patrice Lumumba, celui à qui sera confié le poste de premier ministre à l'indépendance.. Cette scène banale de la vie africaine est aussi typique, en fait, d'un rituel d'ouverture qui caractérise le conte; les rapports créés entre le conteur (le bonimenteur) et son auditoire. La situation est renforcée également par le chant, la danse et la participation du public. Relier cette scène à l'univers du conte, c'est aussi être invité à pénétrer dans le merveilleux, dans un monde où l'ordre des choses se trouve inversé. Si l'on part de cette idée de renversement, nous sommes donc dans une forme subversive du discours.
En quelques lignes, sous le laïus commercial, le bonimenteur pointe la réalité de la situation: le pouvoir économique et politique aux mains des colonisateurs belges, l'absence de liberté d'expression, de réunion et l'impossibilité de vivre en fonction de ses propres valeurs. Il dénonce, sous l'apparente bonhomie, l'ordre établi par la colonisation, ce qu'il propose en filigrane, un "ordre nouveau et révolutionnaire" devenant ainsi un personnage contestataire et un des porte-paroles de l'auteur. Pour Aimé Césaire, le prophétisme des héros de son théâtre est la première démarche de la révolution. Dans un entretien qu'il avait accordé à la radio en 1970, il ajoute : "je considère que la révolte est la première manifestation de l'humanité de l'homme. C'est le refus de l'injustice, de l'humiliation, de l'aliénation; je crois que la révolte est salutaire (â¦) et que la révolution non seulement est salubre mais pour le réajustement du monde et son humanisation dans l'esprit s'avère indispensable".
Dany Toubiana
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Pistes de lecture
Dans cette pièce de Césaire, le pouvoir politique se distribue, en apparence, de façon inégale d'un côté le pouvoir économique et politique des forces colonisatrices auxquels se soumettent les "chefs" qu'ils ont "cooptés" et de l'autre Lumumba, doté de la puissance de son seul verbe et le peuple, tous les deux soutenus par les immenses espoirs soulevés par l'indépendance. Dans ses discours, Lumumba à travers des images fortes issues du vécu collectif, fait naître le pays
Le langage qu'il emploie en appelle au lyrisme de la langue et en s'enracinant dans la terre du pays, s'oppose à la parole tronquée des discours officiels. Pour avoir osé "engueuler un roi", Lumumba endosse le costume du Fou-insulteur, fonction tribale en usage dans l'ancien Royaume du Kongo.
Ce personnage de fou, nommément désigné ailleurs comme "insulteur de la nation" se retrouve d'ailleurs sous les traits du joueur de sanza qui ponctue l'action régulièrement tout au long de la pièce, ces figures apparaissent à la fois comme des témoins de l'histoire et comme des doubles de Lumumba.
Si dans Et les chiens se taisaient, tout se concentre autour de la révolte du héros sacrificiel, ici on relève un grand nombre d'allusions religieuses. Césaire les rattache à plusieurs schémas : l'un christique, l'autre apocalyptique les deux schémas étant relayés par le syncrétisme de religions prophétiques africaines comme le kibanguisme et à la dynamique du sacrifice dionysiaque.
En dénonçant l'oppression et les malversations, Lumumba tente de rendre possible une Afrique fraternelle et en ce sens il se rapproche du message christique. Le pouvoir subversif de sa parole le place non pas dans une rhétorique politicienne mais plutôt dans le droit fil de la philosophie bantoue dans laquelle s'intègre la puissance magique du verbe. La fraternité à laquelle Lumumba fait allusion ressemble également à celle, proclamée par ces mouvements charismatiques religieux qui, au Congo, ont constitué un défi à la domination coloniale avant et après l'indépendance. Creusant profondément une voie de la contestation permanente, Lumumba la revendique comme une nécessité qui permettra à la fois l'édification d'une nouvelle société et la révélation d'une identité typiquement africaine.
En refusant d'entériner la politique néo-coloniale qui se met en place après l'indépendance, Lumumba se place délibérément dans l'opposition. Sa démarche le situe du côté de l'auteur, c'est-à -dire du côté du mouvement de la Négritude qui affirme son soutien à ces peuples d'humiliés. Comme le poète Césaire qui s'offre corps et âme pour devenir le porteur de l'espérance nègre, Lumumba accepte, à son corps défendant, de devenir le martyr d'une révolution qu'il ne veut pas voir corrompue. En se démarquant du politique, comme le poète, il devient le chantre d'une certaine déraison prophétique. L'identité et la fidélité à soi-même est un acte d'amour que l'on offre à l'Autre pour lui permettre d'exister.
à la fin de la pièce, entouré de quelques fidèles, Lumumba continue de raconter l'Afrique dont il rêve. Ce faisant, parler pour l'homme revient à s'entretenir avec l'Ancêtre et à recueillir la puissance de son Verbe. Obligé de se cacher, la parole de Lumumba puise sa force dans la terre africaine et les Ancêtres qui ont défriché le chemin avant lui. Chercher en soi-même son identité et sa culture en quittant les modèles proposés par l'extérieur est également le credo de la Négritude.
Loin des "héros positifs" du réalisme socialiste surgissant dans les théâtres de nombreux pays africains qui deviennent indépendants dans les années 60, Lumumba comme Césaire est un poète "déraisonnable". Figure de Prométhée, porteur de feu ou Christ souffrant, l"unité Dieu / homme est ici transformée en Afrique /Lumumba. Le temps de la pièce constitue à la fois un espace et un temps prophétiques; d'une certaine façon, le poète sera l'instrument et la mémoire de cette prophétie.
Dany Toubiana
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Du texte à
la scène
La pièce a été créée le 4 octobre 1967 au Théâtre de lâEst Parisien, dans une mise en scène de Jean-Marie Serreau avec Bachir Touré, dans le rôle de Lumumba. Sans doute en raison du grand nombre de personnages, la pièce a été peu montée. Cependant, Mehmet Ullussoy, plus de vingt après en a fait une mise en scène dans laquelle la musique devenait un personnage à part entière.
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Fiche réalisée par Dany Toubiana
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