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Tarentelle noire et diable blanc
Ces fiches sont soumises au respect de la propriété intellectuelle.
Fiche réalisée par Edwige Gbouablé
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Genre
Tragédie
Nombre de personnages
3 femmes
17 hommes
Longueur
3 tableaux
130 pages
Temps et lieux
Une époque de souffrance dans le Congo colonial du début du siècle (1890-1920)
Thèmes
Violence coloniale au Congo
Mots-clés
aliénation , Colonialisme , colonisation , diable , diabolisation , histoire politique , travail forcé
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Consultation de la fiche par rubriques |
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Un premier repérage :
la fable
Résumé de la pièce
Parcours dramaturgiques
Analyse dramaturgique qui fait apparaître l'originalité
de la structure et son fonctionnement général par
rapport à l'espace, au temps, aux personnages, etc.
Pistes de lecture
Analyse plus philosophique et poétique, voire linguistique
qui permet de dégager une interprétation et les
véritables enjeux de la pièce
De plain-pied dans le texte
Un extrait
Du texte à la scène
Petite histoire de la pièce de ses conditions d'écriture
à sa création en passant par les lectures dont elle
a pu faire l'objet
Pour poursuivre le voyage
Extraits de presse ou d'entretien au sujet de la pièce
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Un premier repérage : La fable
Véritable chronique congolaise, Tarentelle noire et diable blanc retrace les douloureuses années du peuple congolais sous le joug des compagnies concessionnaires. L'arrivée des étrangers au Congo a eu un impact considérable, visible à travers la destinée peu reluisante des personnages. Ibouanga, héros sombre, est pris dans un engrenage infernal dès son premier contact avec les choses du monde blanc. Celui-ci mit, en effet, à prix son âme, celles de ses enfants et de sa femme dans le but de se procurer des verroteries européennes. Son infortune (puisqu'il n'a pas pu accéder au sommet du mât de Cocagne où se trouvaient les objets convoités) compromis ainsi le destin de sa famille désormais propriété privée du concessionnaire Faustino. Pour échapper à cet esclavage, l'épouse d'Ibouanga choisit l'exil dans lequel elle perdit ses quatre enfants et toute sa dignité. Le cinquième fils, après plusieurs années au service de Faustino prit la voie de la rébellion qui se soldera par son exécution, présentée comme une rédemption car, à la déclaration de Faustino "demain matin tout sera fini pour toi", celui-ci répond : "non c'est demain que tout va commencer".
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Parcours dramaturgiques
La pièce se subdivise en trois épisodes couvrant de longues périodes historiques. Le premier va de 1890 à 1916, le deuxième de 1916 à 1920 et le troisième se situe après les années 20. Chaque épisode comprend des scènes qui se déroulent en des lieux et des moments différents. La densité des événements génère ainsi l'éclatement de l'espace-temps qui s'étire au fil des épisodes. Cet élargissement du champ d'action, avec tout ce qu'il comporte comme péripéties, donne à la pièce l'allure d'un film. La structuration épisodique fait penser à un documentaire historique dont la forme dramatisée déverrouille les axes théâtraux. Les actions et le dialogue des personnages investissent paradoxalement le prologue censé les annoncer. C'est un continuum dialogique dans lequel récits et paroles dialoguées, narration et jeu s'interpénètrent. La présence de dates historiques et d'événements réels, fait de l'espace-temps une unité instable qui passe de la réalité à la fiction. Le temps historique rompt momentanément le processus imaginaire pour projeter le lecteur-spectateur dans l'univers de la mémoire où ressurgissent les souffrances du passé. Cette bi-temporalité est incarnée par Koussalouba, personnage féminin dont le vieillissement spectaculaire est la manifestation d'un décalage temporel. Venue du pays des "Hommes-arbres" où le temps est ralenti, Koussalouba transcende le temps historique, d'où sa présence constante sur scène à travers les trois épisodes.
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Pistes de lecture
Une écriture de démythification
L'Åuvre de Sylvain Bemba met en lumière, à partir du titre même, Tarentelle noire et diable blanc, la déchéance du colon comparé ici à "un démon étranger", "un éteigneur d'âme" venu plonger les consciences des peuples noirs dans "la nuit de l'obscurantisme et du désordre métaphysique" (p.22). En somme, le Blanc est un être vilipendé, dont l'autorité est de plus en plus contestée, voire défiée. Un tel traitement du personnage blanc, déconstruit le mythe de l'Occident longtemps entretenu par le théâtre populaire. C'est aussi une écriture cathartique qui vient purger les frustrations subies pendant de longues années de soumission. Le théâtre historique devient par conséquent, une sorte de défouloir, c'est-à -dire un espace de libération des pulsions longtemps réprimées. Ce phénomène de diabolisation du Blanc enclenché dans le théâtre africain depuis 1956 avec Et les chiens se taisaient de Césaire, crée en dehors de l'effet compensatoire, une contre-mythologie qui magnifie les personnalités noires au détriment du Blanc. La violence verbale proférée par les personnages opprimés est la manifestation d'une démythification de l'héroïsme blanc. Le "béni-oui-oui" du temps colonial fait place à une révolution de la parole. Elle est dite à satiété par les personnages qui en usent comme première arme de combat. C'est un espace de dénonciation, d'injures, de protestation, bref de tout ce qui disqualifie le Blanc aux yeux du monde noir. Ce bouleversement du symbole occidental s'accentue dans la pièce avec la perversion, par l'écrivain congolais, des usages dramatiques. La dénaturation du prologue, "l'absence d'épilogue" et l'éclatement de l'espace-temps sont l'expression d'une remise en cause de la domination étrangère. Tarentelle noire et diable blanc est l'écriture de la dialectique démythification/mythification dans la mesure où, le Blanc, démasqué par ses pratiques inhumaines revêt désormais le statut du barbare, tandis que le peuple noir acquiert par sa bravoure, la considération due à toute race humaine.
Fiction et poids de l'Histoire
L'Histoire et la fiction sont en permanente concurrence dans Tarentelle noire et diable blanc. Il y a à ce niveau, une sorte de va et vient entre ces deux réalités. Le dramaturge superpose aux discours des personnages, des récits prélevés sur de vrais rapports administratifs. C'est le cas du code de l'indigénat rappelé par l'un des narrateurs pour expliquer aux lecteurs, l'atroce situation de privation et de déculturation dans laquelle le colon contraignait les nègres. On peut également noter les rapports de "1923"et de "1921" qui rendent compte des mesures draconiennes imposées aux travailleurs noirs, de la violence perpétrée sur les chantiers de construction gérés par les compagnies concessionnaires, en l'occurrence la C.F.C.O. Le réel trahit ainsi la fiction en des endroits du texte, par le biais de mots, de scènes renvoyant à un pan de la vérité sociale. La pièce de Sylvain Bemba fonctionne en fait comme un film, un reportage qui se débobine au fil de l'Åuvre. La structure en épisode du texte ponctuée par des dates historiques rompt momentanément le processus fictionnel pour projeter le public dans l'univers de la mémoire où ressurgissent les souffrances du passé. S'il est vrai que le fantastique, enraciné dans le culturel et le traditionnel, semble dominer quelque peu l'Åuvre de Sylvain Bemba, il n'en demeure pas moins que c'est l'Histoire, en tant que cause et enjeu de l'écriture qui déclenche la fabulation. L'Histoire, ici, est utilisée comme prétexte et constitue finalement le moteur du drame. De là , toute l'importance du réel au sein de l'écriture politique de Sylvain Bemba, qui répond à une idéologie fondée sur la restauration de la justice. Laquelle justice passe avant tout par le témoignage, la résurgence du passé comme source d'édification et de conscience nationale des peuples opprimés.
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De plain-pied dans le texte
KOUSSALOUBA.- Tu te trompes, mon fils. Au contraire nous vous donnons l'occasion d'acquérir votre propre expérience qui est votre fille, chair de votre chair, sang de votre sang. En étreignant charnellement la difficulté, vous assumez pleinement la responsabilité de la paternité au lieu de vous contenter de chérir l'enfant né des Åuvres d'un autre père. Voilà pourquoi la liberté est une conquête ou une récolte saisonnière dont les semailles n'ont jamais lieu une fois pour toute. Ainsi chaque génération est condamnée à faire refleurir la liberté au prix de ses propres mérites et efforts. FAUSTIN.- Je comprends, mère. C'est donc d'un pas ferme que je marcherai vers le poteau d'exécution. Je mourrai bravement en chantant et en jetant un défi à mes bourreaux. KOUSSALOUBA.- Tu mourras pour revivre ici et pour renaître dans le souvenir des jeunes générations à qui tu passeras le flambeau de ton exemple glorieux. FAUSTIN.- Il me tarde d'être déjà à demain pour en finir. KOUSSALOUBA.- Le jour est proche, mon fils. La nuit enroule imperceptiblement son immense natte chamarrée d'étoiles. C'est l'heure où les hiboux devancent les pleureuses du village en faisant entendre leur ululement qui annonce une mort inéluctable. L'aube n'est pas loin. FAUSTIN.- Un jour nouveau va se lever pour moi, mais je ne verrai pas le soleil du jour suivant. KOUSSALOUBOU.- Qu'as-tu besoin de regretter le soleil, mon fils ? Il existe une lumière intense que celle de mille soleils réunis. C'est la lumière de l'âme fidèle à elle-même.
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Pour poursuivre le voyage
- Ange-Séverin MALANDA, Lire l'Åuvre de Sylvain Bemba, ED. CIREF, 2000 - Georges ELONGA, "Tarentelle noire et diable blanc ou l'éclatement antithétique" in Mukala KADIMA et André-Patient BOKIBA, Sylvain Bemba, l'écrivain, le journaliste, le musicien, Paris, L'Harmattan, 1997 - Dominique NIOSSOBANTOU, "Tarentelle noire et diable blanc, un film qui manque de sponsor" in Mukala KADIMA et André-Patient BOKIBA, Sylvain Bemba, l'écrivain, le journaliste, le musicien, Paris, L'Harmattan, 199 |
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Fiche réalisée par Edwige Gbouablé
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